Au service de la monarchie dès 1635, Le Nôtre entame sa carrière comme jardinier de Gaston d’Orléans, oncle de Louis XIV. Issu d’une famille de jardiniers du roi dès le XVIe siècle, il se forme dans le jardin des Tuileries (dont il obtient la survivance de jardinier ordinaire en 1637 que possède alors son père) qu’il modifie en 1666‑1672, créant au-devant la vaste perspective des Champs-Elysées. Ses travaux pour Fouquet à Vaux-le-Vicomte en 1656-1661 lui attirent gloire et fortune.
Contrôleur général des Bâtiments du roi depuis 1657, Louis XIV le prend à Versailles dès 1662 tandis qu’il travaille aux jardins de Chantilly pour le Grand Condé. Sur la base du jardin primitif de Louis XIII, Le Nôtre aménage près du Château deux grands parterres nord et sud. Il remodèle le grand axe est-ouest qu’il entend prolonger dans une perspective sans fin. S’il conserve la déclivité naturelle du terrain au nord, le reste est en revanche remodelé à force d’hommes.
À Versailles, Le Nôtre peaufine ses conceptions en matière de jardin : des axes principaux entrecoupés d’allées secondaires délimitent les bosquets ; treillages et charmilles forment de vastes murs de verdure qui soulignent les perspectives ; des allées obliques ou sinueuses mènent aux bosquets afin de ménager la surprise du visiteur ; des décors et jeux d’eaux originaux contrastent avec la rigoureuse symétrie des masses boisées.
Utilisant toutes les ressources de l’eau, Le Nôtre joue sur l’ombre et la lumière en passant d’espaces obscurs (bosquets) à des zones plus éclairées (parterres). Parterres et allées principales sont jalonnés de statues et d’ifs taillés dans les formes les plus étonnantes qui font de Versailles un haut lieu de l’art topiaire.
Ce savant équilibre entre symétrie des axes et fantaisie des masses est appliqué avec plus ou moins de rigueur dans les autres grandes réalisations du jardinier : Saint-Cloud pour Monsieur, frère de Louis XIV (1665) ; Sceaux pour Colbert (1670-77) ; Clagny pour Mme de Montespan (1674)… Outre Versailles, Le Nôtre réalise pour le roi la grande terrasse de Saint-Germain (1669-72) et les jardins de Trianon (1672-88). Anobli en 1675, il bénéficie jusqu’au bout de la faveur du roi et – fait rarissime – de son amitié. En retour, l’artiste lui lèguera en 1693 une partie de ses collections.