Directeur musical et pédagogique de la Maîtrise du Centre de musique baroque de Versailles, il s'occupe de l'ensemble de musique baroque Sébastien de Brossard. Découvrez « Le Versailles de » Fabien Armengaud.
Le Versailles de
Fabien Armengaud
Sa biographie
Fabien Armengaud est tombé « amoureux » du clavecin à l’âge de 14 ans. Après des études au conservatoire de Toulouse puis au Conservatoire à Rayonnement départemental de la vallée de Chevreuse, il intègre en 2000 le Centre de musique baroque de Versailles, d’abord comme continuiste. Il devient ensuite chef-assistant de la Maîtrise aux côtés d’Olivier Schneebeli, dont il prend la succession en septembre 2021 comme directeur musical et pédagogique de la Maîtrise. En parallèle, il s’occupe de l’Ensemble de musique baroque Sébastien de Brossard, qu’il a créé en 2014, avec pour objectif de redécouvrir des compositeurs baroques oubliés. Il vient de sortir chez l’Encelade un disque consacré à Etienne Richard, professeur de clavecin de Louis XIV. Il est intervenu pour la programmation culturelle « 1 an à Versailles » dans le cadre de conférences musicales.
Ses coups de cœur
- Versailles émerveille le visiteur, mais bien souvent chacun s’attache à un lieu plus qu’à un autre ; lequel est-ce pour vous ? Pourquoi ?
Cela va peut-être vous surprendre mais le lieu le plus extraordinaire pour moi, ce sont les jardins. Cela fait maintenant plus de vingt ans que je les arpente, à pied, à vélo, voire même en voiture de golf pour les faire découvrir à mon fils quand il était petit. Je reste émerveillé comme un enfant devant la Grande Perspective. J’aimerais remonter le temps pour avoir le luxe de découvrir la fameuse grotte de Thétis et bien sûr le labyrinthe. Méditer et travailler mes partitions en faisant le tour du Grand Canal, s’émerveiller encore et encore devant la salle de Bal… Je serais d’ailleurs bien embêté si je devais choisir un lieu précis ; peut-être quand même vous faire part de ce sentiment étrange quand vous vous retrouvez au bout du Grand Canal, face au Château, d’être devant tant de grandeur, et de se sentir tout petit, une belle leçon d’humilité je trouve.
- Au détour d’une salle ou d’une allée, une peinture, une sculpture ou un objet a retenu votre attention ; quel est-il ? Que représente-t-il pour vous ?
Déformation professionnelle oblige, deux « objets » bien sûr ont retenus plus particulièrement mon attention, il s’agit des deux somptueux clavecins historiques de Rückers et Blanchet, désormais dans les appartements de Mesdames. J’ai découvert le Rückers lorsque j’avais quatorze ans, en visitant pour la première fois le Château avec mon père. Je suis tombé en amour comme on disait au XVIIème siècle. Je n’arrivais plus à avancer dans la visite, tellement j’étais subjugué et émerveillé par cet instrument. Depuis, j’ai eu la grande chance de pouvoir jouer plusieurs fois ces clavecins grâce à la l’accueil chaleureux et bienveillant de Monsieur Hans, conservateur au château, et je pense que comme Lamartine, si vous me permettez cet anachronisme, oui, ces objets ont définitivement une âme.
- Nos premiers pas dans la galerie des Glaces, l’eau jaillissant des Grandes Eaux… Chacun d’entre nous possède un souvenir de Versailles plus fort que les autres. Lequel est-ce pour vous ?
Un souvenir plus que marquant pour moi fut sans hésiter la découverte du Petit théâtre de la Reine à Trianon. Certes, l’Opéra royal reste lui-aussi un lieu emblématique et qui m’a profondément marqué tout comme la Chapelle royale que j’ai plaisir à retrouver tous les jeudis en étant chaque fois saisi et happé par un détail que je n’avais pas remarqué auparavant ! Toutefois, les dimensions « humaines » du Petit théâtre de la Reine me séduisent. Il faut dire aussi que c’est à proprement parler le théâtre dans le théâtre : le lieu est insoupçonnable pour un œil non aguerri. L’atmosphère, les décors en carton-pâte, la machinerie extraordinaire, la fosse d’orchestre, tout est captivant ! C’est littéralement un lieu hors du temps. J’ajoute que la visite menée par Jean-Paul Gousset fut mémorable. Moi qui m’étais tant promené dans ce parc, j’étais loin d’imaginer un tel bijou, caché derrière les arbres.
Ses conseils de lecture
- Versailles se raconte à travers des milliers de pages, des mémoires les plus anciens aux livres d’art les plus récents. Quel est pour vous le livre incontournable sur Versailles ?
Difficile pour moi de ne choisir qu’un seul livre sur Versailles ! Quel dilemme… Toutefois, s’il fallait n’en retenir qu’un, ce serait pour moi Versailles, Opéra de Philippe Beaussant, grand écrivain et rappelons-le ici, créateur du Centre de Musique Baroque de Versailles. J’ai lu bon nombre de ses ouvrages sans jamais me lasser ; jeune étudiant, il m’a permis cette porte d’accès à la littérature sur la musique baroque. C’était un homme érudit et accessible. Laissez-moi citer un extrait : « L’homme baroque est celui pour qui l’être et le paraître se confondent. On est ce qu’on paraît. On n’est que ce qu’on paraît ». Ou bien encore : « Le jeu de la vie de Cour ne touche pas à l’homme individuel. Tout se passe au niveau des signes, des symboles et de leur échange. La partie ressemble à un jeu d’échecs. »
- Classique, récit d’aventures, beau-livre… Incontournable de votre bibliothèque ou récente découverte, auriez-vous un conseil de lecture à nous donner ?
Sans hésiter, le plus beau livre sur Versailles est l’ouvrage somptueux de Philippe Dasnoy Versailles disparu. Les gouaches et dessins de Thierry Bosquet sont justes sublimes. Cet ouvrage nous permet ainsi de remonter le temps et de découvrir la Ménagerie, la Grotte de Thétis dont j’ai déjà parlé, le Trianon de porcelaine, le Cabinet des Bains et bon nombre d’autres lieux encore. Il y a également l’évocation des Plaisirs de l’Ile enchantée, ces formidables journées de fêtes et de spectacles. J’aurais tant aimé assister à cela ! Versailles pour moi est le lieu du rêve, de la féérie, de l’imagination et ce livre retrace à merveille tout cela. Dans un autre domaine, Le château de mon père, roman graphique retraçant l’histoire de Pierre de Nolhac, conservateur qui a tant fait pour Versailles, est passionnante !
Retrouvez en écoute la conférence musicale avec Fabien Armengaud : "La Princesse Palatine et Saint-Simon, le Château sans concession".