Le Grand Appartement de la reine retrouvé
Depuis le 16 avril, le Grand Appartement de la Reine - constitué de la chambre de la Reine, du salon des Nobles, de l’antichambre du Grand Couvert et de la salle des Gardes - est de nouveau accessible au public. Fermé depuis janvier 2016, dans le cadre d’un grand chantier, il dévoile ainsi toute la magnificence retrouvée du décor rocaille de la chambre de Marie-Antoinette ou encore celui de la salle des Gardes restauré grâce au mécénat des American Friends of Versailles et de la Société des Amis de Versailles.
La chambre de la Reine
La chambre est la pièce principale de l’appartement, celle où la reine se tenait le plus souvent. Elle y dormait, souvent rejointe par le roi. Le matin, elle y recevait durant et après sa Toilette qui constituait un moment de Cour aussi réglementé par l’étiquette que le Lever du roi. C’est là encore qu’avaient lieu les accouchements en public : dix-neuf « Enfants de France » y sont nés. Le décor conserve le souvenir des trois reines qui ont occupé la pièce : le compartimentage du plafond remonte à la reine Marie-Thérèse, mais les peintures en grisaille par Boucher ont été réalisées pour Marie Leszczinska, ainsi d’ailleurs que les boiseries. Tous ces éléments ont été conservés du temps de Marie-Antoinette pour laquelle seuls le mobilier et la cheminée ont été livrés de neuf.
Lors de l’invasion du château par les émeutiers le 6 octobre 1789, Marie-Antoinette parvint à leur échapper par la petite porte gauche de l’alcôve ouvrant sur un corridor donnant accès aux cabinets intérieurs de la Reine, une douzaine de petites pièces réservées à sa vie privée et à son service. À la Révolution, le château ne fut pas pillé, mais ses meubles furent dispersés lors de ventes aux enchères qui durèrent une année entière. Certains ont pu être retrouvés, comme le serre-bijoux de Schwerdfeger qui se trouve à gauche du lit, ou comme l’écran de cheminée ; d’autres ont été remplacés par des pièces équivalentes : tel est le cas des sièges livrés en partie pour la comtesse de Provence, belle-sœur de la reine, et en partie pour la visite du roi de Suède Gustave III. Quant aux étoffes qui tendent le lit et les murs, elles ont été retissées à Lyon d’après les cartons originaux conservés. Le lit et la balustrade ont été resculptés d’après des documents anciens.
Le salon des Nobles
Antichambre sous la reine Marie-Thérèse, c’est dans cette salle que Marie Leszczinska accordait ses audiences solennelles, assise sous un dais. Elle y tenait également son cercle, comme on appelait ce temps de conversation réglé avec les dames de la Cour. Marie-Antoinette fit refaire entièrement la décoration, ne conservant que les peintures du plafond, et pour elle, on tendit les murs de damas vert pomme bordé d’un large galon d’or. Un nouveau mobilier fut livré, à la fois extrêmement moderne et raffiné. En effet, pour les majestueuses commodes et encoignures destinées à cette pièce, Riesener, l’ébéniste préféré de la reine, sacrifia à la dernière mode anglaise, abandonnant ses marqueteries fleuries habituelles pour de grands à-plats d’acajou, tandis que les bronzes dorés ainsi que les tablettes de marbre bleu turquin de ce majestueux ensemble étaient assortis à ceux de la cheminée, elle aussi nouvelle.
L’antichambre du Grand Couvert
C’est dans l’antichambre de la reine qu’avaient lieu les repas publics dont le fastueux rituel attirait beaucoup de monde. Seuls les membres de la famille royale pouvaient prendre place à table et, devant eux, assises, les duchesses, princesses ou titulaires de grandes charges ayant le privilège du tabouret, puis, debout, les autres dames et les personnes qui, de par leur rang ou avec l’autorisation des huissiers, avaient pu entrer. Louis XIV s’astreignait à cette représentation presque tous les soirs ; Louis XV lui préféra bien souvent les soupers intimes ; quant à Louis XVI et à Marie-Antoinette, un témoignage du temps nous rapporte que « la Reine se mettait à la gauche du Roi. Ils tournaient le dos à la cheminée. […] Le Roi mangeait de bon appétit, mais la Reine n’ôtait pas ses gants et ne déployait pas sa serviette, en quoi elle avait grand tort ». Contre cet ennui, Marie-Antoinette demanda qu’il y ait toujours musique au Grand Couvert et à cette fin, une tribune pour les musiciens fut aménagée dans la pièce.
L'antichambre du Grand Couvert de la Reine a été restauré en 2009-2010 grâce à un mécénat de Martell & Co.
La salle des Gardes
Au débouché de l’escalier de la Reine, dit aussi « escalier de Marbre », on pénétrait dans le Grand Appartement de la Reine par cette salle des Gardes où, jour et nuit, douze gardes du corps accomplissaient leur service auprès de la souveraine. À Versailles, seuls le roi, la reine et le dauphin pouvaient ainsi disposer d’une garde personnelle composée de soldats appartenant à ces unités d’élite qu’étaient les quatre compagnies des Gardes du corps du Roi. La grande salle suivante, dite aujourd’hui « salle du Sacre », leur était d’ailleurs affectée. Elle servait de corps de garde.
La salle des Gardes de la Reine est la seule pièce de l’enfilade dont le décor du XVIIe siècle a été conservé : la reine n’ayant pas l’occasion de s’y tenir, il ne parut jamais nécessaire de le moderniser. C’est pourquoi on y voit encore les lambris de marbre caractéristiques du premier état des Grands Appartements ainsi que des peintures, placées là en 1680, qui proviennent de l’ancien salon de Jupiter, devenu salon de la Guerre.
« Le service des Gardes du corps, au Château, consistait à monter la garde aux portes des appartements, à prendre les armes quand les princes passaient, à garnir la Chapelle pendant la messe et à escorter les dîners de la famille royale. Ils devaient connaître les ducs et pairs, car, à leur passage, la sentinelle devait porter les armes et frapper deux coups du talon droit. De même, cette sentinelle devait ouvrir la porte et ne pas la laisser ouvrir ; mais l’on sent que le garde était lui-même très-aise qu’on l’exemptât de toutes ces fonctions. »
C’est par ici que le 6 octobre 1789, à l’aube, les assaillants venus réclamer du pain au roi, tentèrent d’atteindre les appartements de la reine, avant qu’une femme de chambre prévenue par un garde du corps ne verrouille la porte du Grand Couvert et conseille à la reine de se sauver. Rebroussant chemin, les assaillants tentèrent alors de pénétrer par la salle des Gardes du Roi.
Podcast "Comment vivaient les reines à Versailles ?"
L'émission "Au coeur de l'histoire", diffusée sur Europe 1, a consacré le 18 avril 2019 un numéro à la vie des reines au château de Versailles. A l'occasion de la réouverture du Grand Appartement de la Reine, Fabrice d'Almeida vous fait revivre les moments les plus marquants de la vie des reines, mais aussi les plus intimes, alors que l’étiquette plaçait la famille royale dans une représentation permanente.
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