Historien, auteur notamment du Versailles des présidents et Dans les châteaux de la République, il a consacré ses travaux de recherche à l’étude du château de Versailles au XXe siècle. Découvrez « Le Versailles de » Fabien Oppermann.
Le Versailles de
Fabien Oppermann
Sa biographie
Ancien élève de l’École nationale des chartes et de l’Institut national du patrimoine, Fabien Oppermann est historien. Il est depuis 2018 inspecteur général aux ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, en charge notamment de l’histoire des arts, après avoir été conservateur en chef du patrimoine de ces ministères pendant douze ans. Il a consacré ses travaux de recherche à l’étude du château de Versailles au XXe siècle et a publié plusieurs ouvrages et articles sur le sujet, dont Le Versailles des présidents (Fayard, 2015) et Dans les châteaux de la République (Tallandier, 2019).
Ses coups de cœur
- Versailles émerveille le visiteur, mais bien souvent chacun s’attache à un lieu plus qu’à un autre ; lequel est-ce pour vous ? Pourquoi ?
La magie de Versailles se mérite, après avoir marché, sillonné, arpenté. Pour ma part, l’émerveillement absolu arrive au Grand Trianon, après avoir admiré les splendeurs du Château et la magnificence des jardins. En arrivant à Trianon, on trouve un lieu plus calme, plus dépouillé, plus simple, peut-être aussi plus accessible. Le dépouillement et la simplicité sont bien sûr relatifs, mais j’y sens une forme de modestie, dans laquelle la phrase de Louis XIV : « j’ai fait Versailles pour ma cour, Marly pour mes amis, et Trianon pour moi » prend tout son sens. Enfin, ce qui émeut au Grand Trianon, c’est la continuité de l’histoire qu’on y trouve, depuis le Roi-soleil jusqu’aux fastes de la République avec l’appartement du général de Gaulle, en passant par Napoléon et Louis-Philippe. Les trois derniers siècles sont réunis dans ce lieu, par son architecture, par ses décors, par son histoire.
- Au détour d’une salle ou d’une allée, une peinture, une sculpture ou un objet a retenu votre attention ; quel est-il ? Que représente-t-il pour vous ?
Il y a tant de merveilles dans le Château, le parc, les Trianons... S’il ne faut en choisir qu’un seul, ce serait le plateau de table en pierres dures, présenté dans le salon de l’Abondance, réalisé par Couplet en 1684, qui représente une carte de France et d’une partie de l’Europe, détaillant les différentes provinces, chacune étant figurée par une pierre dure de couleur. Les rivières sont en albâtre et le fond en marbre blanc, avec des bordures en marbre bleu turquin. C’est un meuble très précieux, qui témoigne du faste de l’ameublement de Versailles, notamment au XVIIe siècle. Par ses matériaux précieux et par le sujet représenté, il symbolise aussi d’une certaine manière l’absolutisme de Louis XIV sur son royaume. Cette table est revenue du Louvre à Versailles en 1953, année de l’arrivée à la tête du château de Gérald Van der Kemp qui fit du remeublement l’un de ses principaux combats.
- Nos premiers pas dans la galerie des Glaces, l’eau jaillissant des Grandes Eaux… Chacun d’entre nous possède un souvenir de Versailles plus fort que les autres. Lequel est-ce pour vous ?
En juin 2009, le président du Château m’a demandé de bien vouloir répondre aux questions d’un journaliste à l’occasion des 90 ans du traité de Versailles. En fin de journée, alors que le soleil commençait à décliner au-dessus du Grand Canal, nous nous sommes retrouvés tous les trois, le journaliste, le caméraman et moi dans la galerie des Glaces que les derniers touristes venaient de quitter. Pendant une petite heure, nous avons arpenté la galerie, les salons de la Paix et de la Guerre, pour évoquer ce 28 juin 1919 qui mettait fin à la Première Guerre mondiale, avec le soleil couchant qui se reflétait dans les 357 miroirs et illuminait le décor extraordinaire de Hardouin-Mansart, sous les voûtes peintes par Le Brun qui venaient d’être restaurées – et dont j’avais pu vers 2005 visiter le chantier, tout en haut des échafaudages, au plus près des peintures, un autre souvenir extraordinaire.
Ses conseils de lecture
- Versailles se raconte à travers des milliers de pages, des mémoires les plus anciens aux livres d’art les plus récents. Quel est pour vous le livre incontournable sur Versailles ?
Versailles est une source inépuisable pour le lecteur, mais s’il ne faut retenir qu’un seul livre, c’est pour ma part celui de Pierre Verlet, publié en 1961 chez Fayard avec le titre Versailles, et réédité en 1985 sous le titre Le château de Versailles. Ce livre est certes un peu aride, sans illustration qui puisse donner une idée des splendeurs évoquées par l’auteur, mais il est, en un seul volume, une mine inégalée d’informations sur l’histoire, les événements, les lieux, les personnages, les décors du château de Versailles. Verlet a été l’un des premiers à consulter massivement les archives de la Maison du roi, et notamment les immenses registres du garde-meuble. Il a tiré de ces recherches de nombreux livres et articles très précis, qui ont fait de lui l’un des initiateurs du remeublement du château… dans lequel il n’a pourtant jamais travaillé !
- Classique, récit d’aventures, beau-livre… Incontournable de votre bibliothèque ou récente découverte, auriez-vous un conseil de lecture à nous donner ?
Camille Pascal a publié en 2018 un livre assez ambitieux, L’été des quatre rois, qui raconte sous la forme de roman les quelques jours qui ont vu la chute de Charles X et l’avènement de Louis-Philippe en 1830. On y croise quelques familiers de la cour de Versailles d’avant 1789 ainsi que tous ceux qui ont fait la Restauration et la monarchie de Juillet, qui évoluent dans des lieux qui évoquent la transition entre royauté, Empire et République. Certains de ces endroits ont disparu, comme les Tuileries, le château de Neuilly ou celui de Saint-Cloud, d’autres se visitent aujourd’hui, comme Rambouillet ou Maintenon. Il y a même quelques scènes à Trianon. Les lieux sont délicieusement décrits, les personnages sont très bien cernés, et on assiste en témoin privilégié à la chute inexorable de Charles X en même temps qu’à l’ascension, loin d’être un hasard, de son cousin.
Retrouvez en écoute la conférence de Fabien Oppermann : "Au service de la France - De Gaulle et Versailles".
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